L’article L. 145-5 du code de commerce dispose que les parties peuvent, lors de l’entrée dans les lieux du preneur, déroger aux dispositions du chapitre relatif aux baux commerciaux à la condition que la durée totale du bail ou des baux successifs ne soit pas supérieure à trois ans. Si, à l’expiration de cette durée, et au plus tard à l’issue d’un délai d’un mois à compter de l’échéance le preneur reste et est laissé en possession, il s’opère un nouveau bail dont l’effet est réglé par les dispositions du chapitre relatif aux baux commerciaux.
Il appartient donc au bailleur qui ne souhaite pas que la relation contractuelle soit soumise à ce statut de signifier au preneur, avant la date contractuelle d’expiration du bail, sa volonté d’y mettre un terme.
La Cour de cassation s’est récemment prononcée sur la question de savoir s’il est nécessaire que le preneur soit immatriculé au registre du commerce et des sociétés au répertoire des métiers afin de prétendre à l’octroi d’un nouveau bail régi par les règles statutaires l’application de ce texte (Cassation 25 octobre 2018 – pourvoi 17-26126).
En l’espèce, le 15 février 2004, la bailleresse a donné à bail dérogatoire aux preneurs un local commercial pour une durée de vingt-trois mois à compter du 15 février 2004, les preneurs s’engageant, à peine de caducité du contrat, à fournir une attestation de leur inscription au registre du commerce et des sociétés dans un délai de deux mois suivant la prise d’effet du bail.
Trois autres baux dérogatoires de même durée ont été conclus successivement à compter du 1er février 2006, du 1er février 2008 et du 1er février 2010.
Le 6 août 2013, le preneur, laissé en possession des lieux loués, a assigné la bailleresse aux fins de voir constater qu’il était titulaire d’un bail commercial d’une durée de neuf années ayant commencé le 1er février 2006.
Invoquant l’absence d’immatriculation du preneur au registre du commerce et des sociétés à la date de l’assignation, la bailleresse a conclu au rejet de la demande et, à titre reconventionnel, à l’acquisition de la clause résolutoire du dernier bail dérogatoire.
La Cour d’appel de Montpellier a fait droit aux demandes du preneur.
Le bailleur forme un pourvoi et soutient que le preneur qui revendique le statut des baux commerciaux doit justifier d’une immatriculation à la date où il a assigné le bailleur à cette fin et qu’en l’espèce, le preneur ne satisfait pas aux prescriptions de l’article L. 145-1 du code de commerce faute d’avoir jamais été inscrit au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers et qu’en affirmant que le preneur, sans être inscrit au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers, pouvait bénéficier d’un bail commercial statutaire à compter du 1er février 2006 dès lors qu’il était resté en possession à l’expiration du bail dérogatoire initial, la cour d’appel aurait violé les article L. 145-1 et 145-5 du code de commerce.
La Cour de cassation rejette ce moyen et considère qu’ayant relevé que le preneur avait été laissé en possession à l’expiration du premier bail dérogatoire, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a retenu à bon droit, sans contradiction, que l’inscription au registre du commerce et des sociétés n’est pas nécessaire pour que s’opère un nouveau bail régi par le statut des baux commerciaux et en a exactement déduit que le preneur était devenu titulaire d’un bail statutaire de neuf ans à la date du 1er février 2006.
Il sera néanmoins rappelé que dans le cadre du renouvellement d’un bail commercial classique le droit au renouvellement suppose une inscription au registre du commerce et des sociétés (article L 145-1 du code de commerce).
Il en va de même du droit au paiement d’une indemnité d’éviction en cas de refus de renouvellement.
L’arrêt de la Cour ne remet pas en cause ces principes constamment rappelés par la jurisprudence.